Platon
: Les lois; Aristote : La Politique; Cicéron : La République; Machiavel : Le Prince; Montesquieu : L'esprit des lois; Simon Linguet : Théorie des lois civiles, ou principes fondamentaux de la société; Louis de
Bonald : Théorie du pouvoir politique et
religieux; Charles Fourier : Théorie
de l'unité universelle; Charles Maurras : Mes idées politiques... Que de pages fameuses écrites par les philosophes sur l'art de gouverner les
hommes !
Mais pages
toutes théoriques.
Car dans la réalité, qu'en est-il de cet art
subtil ?
Grégoire,
évêque de Tours (538-594), nous le fait savoir dans un ouvrage célèbre
improprement appelé Histoire des Francs
, mais dont le véritable titre est : Decem libros historiarum , car l'œuvre est une histoire universelle, commençant
avec les mésaventures d'Adam et Eve.
Les
citations qui suivent sont de la traduction de Robert Latouche ( Paris, Les
Belles Lettres, 1963), les mots entre crochets [ ] de moi.
Regardons
d'abord agir un souverain énergique, Clovis (465-511), roi des Francs.
[Des
ambassadeurs remettent à Clovis Syagrius, roi des Romains et ] "dès que
Clovis l'eut reçu, il ordonna qu'on le mit sous bonne garde et, après avoir
pris possession de son royaume, il le fit égorger."
"Or
tandis que Clovis se dispose à passer en revue tous les hommes , il s'approche
du briseur de vase [ il s'agît du vase de
Soissons ] à qui il dit :"Personne n'a apporté des armes aussi mal
tenues que les tiennes, car ni ta lance, ni ton épée, ni ta hache ne sont en bon
état". Et saisissant la hache de l'homme, il la jeta à terre. Celui-ci
s'étant un peu incliné pour la ramasser, le roi levant les mains lui envoya sa
propre hache dans la tête lui disant : "C'est ainsi que tu as fait à Soissons
avec le vase".
[Dans une
campagne, un soldat ramasse du foin au lieu d'herbe comme le roi l'avait
ordonné; il est amené devant Clovis, qui lui en fait le reproche et]
"l'homme fut exécuté par l'épée plus vite que la chose n'est dite".
[Clovis
écrit à Clodéric, fils de Sigebert, un roi rival ] : "ton père vieillit et
il boîte de son pied malade. S'il mourait, son royaume te reviendrait de droit,
ainsi que notre amitié." Séduit dans sa cupidité, ce dernier entreprend de
tuer son père." [Il en informe Clovis, qui lui envoie des émissaires
chargés d'achever l'affaire. Clodéric leur montre ses trésors et pendant qu'il
fouille dans un coffre] l'un des hommes, ayant levé la main, lui fracassa la
cervelle de sa hache. Quand Clovis apprit cette chose [il prit] le royaume de
Sigebert avec ses trésors."
[Clovis fait
ensuite prisonniers le roi Chararich et
son fils] " il ordonna de les punir tous deux de mort. Quand ils furent
morts, il s'empara de leur royaume ainsi que de leurs trésors et de leurs
peuples."
[Clovis a
fait prisonnier un roi Ragnacaire et son frère Riquier. Il les fait amener
devant lui, "les mains liés derrière le dos"et...] "ayant élevé
sa hache il l'enfonça dans la tête de Ragnacaire et s'étant tourné vers Riquier,
l'ayant frappé semblablement de la
hache, il le tua. Après leur mort [et le meurtre d'un autre frère], Clovis
recueillit tout leur royaume et leurs trésors."
" Ainsi,
commente Grégoire, Dieu prosternait chaque jour ses ennemis sous sa main et
agrandissait son royaume parce qu'il marchait d'un cœur droit devant lui et
faisait ce qui plaisait aux yeux de Dieu."
Enfin..." Puis quand Clovis eut tué beaucoup d'autres rois et de
proches parents, de qui il se méfiait, il étendit son royaume à travers toutes
les Gaules."
Souverain
moins vigoureux, Thierry, l'un des quatre fils de Clovis, aime, lui, recourir à
de fines ruses.
"Thierry voulut tuer son frère Clotaire; après avoir aposté en
cachette des hommes en armes, il le convoqua chez lui sous prétexte de traiter d'une
affaire secrète et ayant étendu dans une partie de la maison une tenture d'un
mur à l'autre il ordonne à des hommes armés
de se tenir derrière elle. Mais comme cette tenture était trop courte,
les pieds des hommes armés apparurent à découvert. S'en étant aperçu, Clotaire
pénétra en armes avec les siens dans la demeure. Cependant Thierry , devinant
que celui-ci avait découvert la chose, imagine une histoire et parle de choses
et d'autres. Enfin, ne sachant comment faire excuser sa mauvaise foi, il lui
donna un grand plat d'argent pour avoir son pardon. Clotaire, l'ayant remercié
de son cadeau, rentra chez lui. Thierry se plaint alors auprès des siens
d'avoir perdu sans cause valable un bassin et il dit à son fils Théodebert :
"Va chez ton oncle, et prie le de bien vouloir te céder le présent que je
lui ai donné." Celui-ci partit et obtint ce qu'il demanda. Pour faire des
tours de ce genre, Thierry était très malin."
Ni Clovis ni
le malin Thierry n'avaient lu Platon, Aristote etc.
Ces méthodes ne sont-elles pas un peu datées ?
RépondreSupprimerJ'imagine mal François Hollande attirer sous quelque prétexte fallacieux Angela Merkel, David Cameron et autres moindres sires à l'Élysée, leur éclater la cervelle à coup de hache, s'approprier "leurs royaumes et leurs trésors", et de fil en aiguille "étendre son royaume à travers toute l'Europe" sans que qui que ce soit n'y trouve rien à redire.
Nos temps sont ratiocineurs...
"Rien à redire" ?
SupprimerIl y avait des protestataires, mais un bon coup de framée, et hop ! plus de tête !
Ce Clovis me fait penser à Mahomet. Imaginez que Clovis ait fondé sa propre religion, et qu'il nous faille lui témoigner le plus grand respect ! C'est un peu ce qui nous est demandé pour Mahomet.
RépondreSupprimerCela dit, il y a au moins un auteur "théorique" qui colle assez bien à la réalité, c'est Machiavel.
Hop hop hop ! Tout doux mon bon ami, comme vous y allez. De prime abord votre parallèle pourrait passer pour pertinent, or pour comprendre cette frénésie de conquête de royaumes, il faut bien avoir à l'esprit qu'à l'époque de Clovis, la monarchie était élective. De plus à la mort du souverain, l'alleu devait obligatoirement être partagé entre les héritiers mâles. Il y avait donc nécessité d'agrandir le domaine afin d'assurer des parts confortables.
SupprimerEn fait, si je vous suis bien, Clovis gérait son royaume "en bon père de famille".
SupprimerAvec Koltchak, les rois sont tous des enfants de Marie.
SupprimerNon non cher Koltchak, la monarchie franque n'a jamais été élective !
SupprimerIl faut lire Fustel de Coulanges qui démontre (en six volumes ) qu'aucun texte, aucun document n'accrédite cette légende fort postérieure.
A cette époque, il valait mieux être copain comme cochons avec Clovis. Ce qui est certain, c'est que ses sujets devaient rarement le contrarier, certains chefs d'état pratiquent encore avec des moyens plus modernes comme le petit gars de Corée du Nord, un citoyen s'étant moqué du défunt dictateur, le fils fit exécute au mortier le railleur depuis personne ne bronche.
RépondreSupprimerPour Hollande, il est tellement mauvais qu'il serait capable de se trancher la main avec sa hache.
Au moins Clovis, connaissait le principe de réalité, ce qu'ignorent fondamentalement nos "modernoeux".
RépondreSupprimerClovis était parfois un peu primesautier, mais il savait ce qu'il voulait.
SupprimerQuant aux politiciens modernes, ils ne s'occupent que du sens duvent qui peut leur faire gagner, ou perdre..., la prochaine élection.