Dans la série produite par l'américain Lionsgate Hannibal, qui prête de nouvelles aventures
au gourmet cannibale Hannibal Lecter, héros meurtrier de Manhunter et de The silence
of the lambs ( et suites et
remakes de moindre envergure) , les perspicaces agents du FBI attendent que
s'écoulent une dizaine d'épisodes avant d'entreprendre une véritable et
traditionnelle enquête pour résoudre l'énigme qu'ils avaient, avec une
surprenante naïveté, cru élucider grâce à des visions assorties de fumeux gazouillis psys. Cette attitude, le refus de la simple recherche de preuves, me
parut d'une si grave invraisemblance que le spectacle commença de me
faire ronchonner – "cela ne peut pas se passer ainsi dans le monde réel".
Mais...
n'aurais-je pas trop vite ronchonné ?
Dans la réalité, ou ce qui tente d'en tenir
lieu, un Président que-le-monde-entier-nous-envie, ( lire la presse étrangère
pour confirmation) a fait publier urbi et orbi (i-e : sur internet ) le rapport officiel établissant toute la vérité sur l'épopée de la
sémillante Leonarda et de sa laborieuse smala.
Tout
historien sait que la finalité d'un rapport
officiel est d'établir cette vérité
officielle qui absout, et même loue, les puissants , tout en décernant un
vigoureux coup de pied de l'âne aux sous-fifres, ici les argousins manquant de discernement. L'historien
sait aussi que cette vérité officielle se doit d'être crédible, et donc d'être construite non seulement sur des
omissions, approximations et francs mensonges, mais aussi sur quelques faits qui peuvent être prouvés grâce à
des documents les attestant, et dont la multitude exclut la falsification.
Parmi
ces faits exposés dans ce rapport de
24 pages ( dont beaucoup sont blanches), je relève que l'enrichissante famille de
Leonarda, la lycéenne-star et vertueuse , a multiplié demandes et recours
devant diverses autorités administratives et judiciaires, et cela de janvier 2009 jusqu'au 03 septembre 2013,
soit une période de quatre ans et huit mois durant lesquels, de toute évidence,
ces autorités n'ont pas manqué de
diligenter toutes les enquêtes nécessaires sur cette nécessiteuse tribu. Or,
pendant ces quatre ans et huit mois, ces autorités, qui ne manquent pas
de personnel d'éxécution, puisqu'il fut possible de mobiliser quatorze (!!!) gendarmes et policiers afin
de rafler marmots et mama ( le bon
papa, plus costaud, ayant été raflé
antérieurement) pour les expédier au verdoyant Kosovo, ces autorités donc auraient été absolument incapables d'établir la vérité sur les deux éléments fondamentaux
qui sont au cœur de toute l'affaire : la nationalité
des attendrissants marmousets et le statut
(éventuellement) conjugal des heureux
géniteurs.
Car c'est seulement lorsque cette méritante
famille a échangé son état de roms subventionnés pour celui, plus médiatique,
de roms persécutés que nous apprenons, de la bouche même du bon papa, que femme
et marmaille sont, non kosovaresques, mais italiens
! et que de surcroît lui et Madame ne sont pas mariés mais vivent dans le
péché, comme un simple Président.
Un
mauvais esprit remarquera que l'affaire eût dû alors s'arrêter net, les
ressortissants italiens ayant un droit absolu de s'établir en Gaule (depuis
Jules César, Leonard de Vinci et Mazarin). Non... non seulement les plus hautes autorités et les multiples envoyés spéciaux rêvant des lauriers de
Woodward et Bernstein ne fournirent aucun fait
confirmant ou réfutant cette italianité, mais... tout continua comme devant,
dans une parfaite invraisemblance.
Jusqu'à hier
où survint un nouveau rebondissement, tel que n'eussent osé imaginer les
hollywoodiens scénaristes d' Hannibal.
Alors que
Leonarda et son aimante famille se promenaient dans la riante campagne kosovarienne
entre minarets,tapis de prières et BMW sans papiers, un groupe d'hommes d'allure indigéne
quoique légèrement nomade croisa leur chemin, un homme en sortit, avança et...
envoya une gifle à la féconde mama ( qui en profita pour se faire hospitaliser
afin d'échapper aux tâches ménagères qui lui incombent culturellement).
Pourquoi ce courroux de l'inconnu? Ce n'était que le geste fort naturel, et
également culturel, d'un époux bafoué , car ce gifleur n'est autre que le
premier ( et seul ? ) mari de notre
héroïne, épousé vingt-cinq ans auparavant dans une pimpante mairie
kosovaresque.
Mais
alors... cette femme ne serait pas italienne ? Elle serait... Un vertige me
prend... ces enquêtes qui omettent
l'essentiel, ces reportages qui ne reportent rien, ce Président qui se ridiculiserait...
ces incohérences s'ajoutant aux invraisemblances... comment tout cela
peut-il avoir un sens ? mais plus,
par un rare phénomène, le mystère s'obscurcissait, plus il commença de
s'éclairer et enfin m'apparut sa solution: la
famille Leonarda n'existe pas !
Et comme
l'on trouve tout sur internet, comma jadis à la Samaritaine, un peu de
Glouglou... et je peux enfin dévoiler la vérité
vraie.
Soucieux de
détourner l'attention d'un peuple trop souvent râleur de sujets embêtants (vilaine montagne de dettes, chômage à courbe
haussière, financement délicat des retraites, gros trou de la Sécu etc.), le
Président, qui réunit en sa seule personne les qualités du puissant stratège,
du fin tacticien et du virtuose politique,
a décidé d'offrir à ses sujets un agréable divertissement. Après
consultation d'experts, chercheurs et consultants le choix se porta sur la
création d'un feuilleton, sur le
modèle de ces fictions qui collent la Gaule profonde à ses téléviseurs. Une
agence de casting trouva figurants et seconds rôles dans l'inépuisable vivier
des intermittents du spectacle tandis que la vedette était dénichée à la Foire
au Boudin de Mortagne-au-Perche, l'écriture du scénario, sur une trame
empruntée à Eugène Sue, Victor Hugo et Georges Ohnet, fut confiée aux rares
compétences de M. Marc Lévy et de Mme Josiane Balasko, tandis que les dialogues
étaient rewrités par M. Didier G***, ghost writer réputé de sitcoms larmoyantes
(L'homme du Picardie , Brigade mondaine, Le miel et les abeilles...) , puis divers metteurs en scéne ( M. Eric
Rohmer, M. Luc Besson, Mme Marguerite Duras ) se disputèrent la réalisation,
finalement octroyée à un videaste sur smartphone...
Ainsi, ô
miracle de l'esprit humain, furent inventés
Leonarda, la lycéenne prodige et rayonnante de beauté intérieure, son robuste papa au franc parler, sa dévouée
mama et ses frères et sœurs dont le nombre varie en fonction du budget alloué à
chaque épisode, et pendant que tout un peuple subjugué par l'audacieuse ingéniosité
du scénario et le charisme des acteurs a pour Leonarda les yeux de Chiméne, le
Président, souriant du succès de sa ruse, se prépare à aller à Hollywood
recevoir, sous les applaudissements du tout-cinéma, un Oscar bien mérité.
Hilarant ! Décidément, Michel, vous savez débusquer la vérité que cachent d'habiles manigances ! Dire que, gamin, que je suis, je m'étais laissé prendre ! Je réalise maintenant mon erreur et regrette amèrement d'avoir consacré tant de temps à cette supercherie ! Merci !
RépondreSupprimerMerci à vous Jacques ( et dire que je suis allé faire la retape chez vous ! -- j'ai honte...)
RépondreSupprimerSi c'est bien ce Didier G*** qui a récrit les dialogues, je m'étonne moins que personne n'ait rien compris à l'histoire et que tous les protagonistes passent pour des semi-débiles !
RépondreSupprimerCe Didier G*** est un rusé ironiste réactionnaire....
SupprimerCrénom, le coup du mari jaloux kosovar qui fait exploser en vol l'hypothétique italienneté d'une bonne partie de la famille, j'avais point vu ! honte sur moi.
RépondreSupprimer"qui réunit en sa seule personne les qualités du puissant stratège, du fin tacticien et du virtuose politique", on dirait l'hommage de Fabius à Giap.
Non, là je verrais plutot une sorte d' "Affreux, sales et méchants" plus vrai que nature..
RépondreSupprimerGiap fut notre ennemi, mais était d'une autre stature que le malheureux H***
RépondreSupprimerMais oui! mais c'est bien sûr! Ne découvrir la nationalité de ces braves gens malgré quatre ans d'enquête aurait dû nous mettre la puce à l'oreille dès le début de l'affaire.
RépondreSupprimerRitals, Kosovars... Mussolini vous aurait dit que c'est la même chose...
RépondreSupprimerEn tous les cas, merci pour ce billet aussi réjouissant qu'éclairant!
Pangloss, la puce à l'oreille c'est pour les clébards.
RépondreSupprimerA moins que ce soit subliminal chez vous. Voulez-vous pucer les Roms ?
En voilà une idée qu'elle est bonne !
Les Italiens ont bien sur le droit de s'installer en France. Mais les ressources (la généreuse manne octroyée aux réfugiés politiques) auxquelles ils pourraient prétendre ne sont certainement pas les mêmes.
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