La
diffusion du signalement, assez approximatif mais très politiquement correct,
d'un mystérieux tireur déclencha une
flamboyante chasse à l'homme télévisuelle digne des épisodes les plus haletants
du Fugitif, et mobilisa les plus
brillants cerveaux de la police
scientifique 2.0 et du profilage
made in Hollywood.
C'est
cependant grâce à une bonne vieille dénonciation, que les derniers policiers
habiles en leur métier attendaient paisiblement au coin du feu, que fut cueilli
le féroce tireur, affalé dans un état comateux sur le siège d'une automobile
qui, loin de rouler à une allure spectaculaire et cinématographique, était
bêtement à l'arrêt.
Nous
apprîmes ensuite que ce tireur de type
européen dont une seule cartouche avait mis en péril la démocratie se nomme
Abdelhakim Dekkar, ne figure pas dans les
fichiers de la police bien qu'ayant purgé quatre ans de prison pour des
faits similaires, et que loin d'être abonné à Rivarol il vient de cette
gauche antifasciste qui se fit aimablement remarquer par quelques assassinats.
Ce
dénouement, dont le principal effet est de faire remettre au tiroir quelques
discours indignés, nous est connu par la lecture des journaux.
Mais une
telle lecture est-elle bien utile ?
En 1842, M.
Alfred de Vigny, alors loué par les critiques et aimé du public, décida de
présenter sa candidature à l'Académie française
et, devant faire les visites protocolaires d'usage, sonna à la
porte de l'un des quarante, le philosophe Royer-Collard ( 1763-1845), président de la Chambre sous Charles X et
toujours député.
Reçu dans
l'antichambre par M. Royer-Collard , " la tête chargée d'une vieille
perruque noire et enveloppé de la robe de chambre de Géronte", de retour
chez lui, M. de Vigny , un peu énervé, écrivit dans son Journald'un poète, à la date du dimanche 30 janvier 1842, le récit
de l'entrevue --extraits :
"R.
C. – J'aurais besoin de savoir de vous-même quels sont vos ouvrages.
A. de V.
–Vous ne le saurez jamais de moi-même si vous ne le savez déjà par la voix
publique. – Ne vous est-il jamais arrivé de lire les journaux ?
R. C.
–Jamais.
A. de V.
–Et comme vous n'allez jamais au théatre, les pièces jouées un an ou deux ans
de suite aux Français et les livres imprimés à sept ou huit éditions vous sont
également inconnus?
R. C. – Oui,
monsieur; je ne lis rien de ce qui s'écrit
DEPUIS TRENTE ANS; je l'ai déjà dit à un autre (Il voulait parler de
Victor Hugo).
A. de
V. en prenant son manteau pour sortir et
le jetant négligemment sur son épaule. – Dès lors, monsieur, comment
pouvez-vous donner votre voix , si ce n'est d'après l'opinion d'un autre ?
R. C. interdit
et s'enveloppant dans sa robe de malade imaginaire. – Je la donne... Je vais aux élections; je ne
peux pas vous dire comment je la donne , mais je la donne enfin."
Grande
sagesse de feu Royer-Collard, qui prouve qu'il n'est nul beson d'être informé
pour donner sa voix ( et grande leçon
pour toute démocratie ) , ni d'ailleurs pour donner son avis sur le moindre
sujet.
Aussi, fort
de cet auguste exemple, ai-je décidé que je commenterai désormais l'actualité
sans en prendre connaissance, ce qui non seulement me fera gagner du temps mais
garantira l'objectivité de mon jugement.
Fichtre, quel dommage de ne plus écouter la RSC™, je ne saurai jamais d'où vient ce "ne figure pas dans les fichiers de la police". Avez-vou un lien ?
RépondreSupprimerComme le dit l'Amiral Woland, ¡ Caramba, encore raté !. "Schadenfreude a rotor bobiné, c'est exactement cela.
Si je ne m'emmêle pas dans les époques, c'est M. Royer-Collard qui me l'a soufflé.
SupprimerEt le nom du monsieur européen est Dekhar et non Dekkar ( qui ferait un peu viking).
Savoureux ! N'est-ce point ce même Royer-Collard qui, lors d'une séance du dictionnaire, parce que certains de ses confrères immortels voulaient admettre un mot que lui-même récusait, s'est écrié : « S'il entre, je sors ! »
RépondreSupprimerSi je me souviens bien, le mot en question (pas fichu, évidemment, de me souvenir duquel il s'agit…) fut repoussé dans les ténèbres extérieures et ne fit son entrée qu'à l'édition suivant, bien après la mort de Royer-Collard.
L'intrus était le verbe "baser".
SupprimerExact !
SupprimerAyant voulu simplifier l'intitulé de mon blog, LE LIEN DE VOTRE LISTE DE BLOGS VERS MON BLOG NE FONCTIONNE PLUS.
RépondreSupprimerIL FAUT CHANGER CE LIEN POUR : http://vudescollines.blogspot.fr/
Ne fonctionne pas plus chez Didier...
RépondreSupprimerJe vais essayer de réparer cela chez moi....
Je sens que Maître Jacques va passer sa journée à pleurnicher sur tous les blogs, au lieu de réparer des clôtures, changer l'installation électrique, nettoyer le poulailler, changer la roue de secours de la Daimler, etc.
SupprimerPour changer cette roue, il faut ouvrir le coffre, ce à quoi cette pimbêche anglaise se refuse....
Supprimer... et astiquer ses poireaux. Enfin, c'est ce que je crois avoir compris.
SupprimerVisser. Un poireau se visse.
SupprimerIl faut tout leur expliquer.
D'ailleurs tout se visse, pour qui possède un tournevis.