Quelle
étrange idée que se plaindre, comme le font trop d'honnêtes gens, de cette
langue abominable qui inonde sites , blogs et autre réseaux sociaux !
Et quel
oubli de l'identité de ces hommes et femmes qui, joyeusement, rédigent message
après message en étalant une absence de pensée égale à leur ignorance de toute
syntaxe !
Ces hommes
et ces femmes forment la masse de
l'humanité, cette masse d'êtres humains qui, il y a encore cent cinquante ans ,
ne savaient ni lire ni écrire, et dont le langage , lorsqu'ils parlaient,
n'éblouissait pas par la richesse de son vocabulaire, même si quelques
tournures hésitantes charmaient par leur pittoresque.
Certes , il
y eut un temps où une armée militante d'instituteurs s'efforça d'enseigner à tout le peuple, même le plus
bas, l'art de tracer à la plume Sergent major des lettres avec pleins et déliés,
les succés furent divers.
Je me
souviens de cette carte de vacances reçue d'un garçon de vingt ans, m'assurant
de ce que je crus deviner être des sentiments respectueux, et signée d'une
croix, derrière laquelle je hasaedais un nom, celui du fils du concierge de
l'usine; je montrai la carte à cet homme, qui confirma -- "c'est bien d'mon garçon" – et
ajouta:
-- L'est
allé à l'école jusqu'à seize ans, mais il a jamais été bin doué pour apprendre...
Aujourd'hui,
ce sympathique prolétaire s'exprimerait sur Fbook ( et sans doute pas pour
manifester du respect à son patron ),
là où les analphabètes , sans avoir
conscience d'écrire (ainsi toute critique sur la forme des phrases
qu'ils adressent à l'éther et quelques amis virtuels est dépourvue de toute
pertinence) , tracent des signes qu'ils croient être des phrases.
Jadis donc,
le bas peuple ne lisait ni n'écrivait – mais, de ce bas peuple, des individus doués parvenaient, par leurs efforts et
leur esprit, à s'extraire , il faut, pour en voir un exemple admirable, lire
les Mémoires de Jean-François
Marmontel qui, fils d'un pauvre cordonnier auvergnat, devint l'ami de Voltaire,
l'un des auteurs les plus lus et estimés de son temps, et l'un des quarante de
l'Académie.
Désormais,
il n'y a plus de bas peuple – tout est classe
moyenne, par le niveau de vie, par l'abandon de la terre et de l'usine pour
le bureau, par un sentiment de sa place
qui doit au nivellement plus qu'à une véritable élévation – et cette masse
imbécile s'exprime, à ce qu'elle croit .
Laissons-lui
en l'illusion, et regardons au-dessus
de nous, là où je trouve des femmes et des hommes qui maîtrisent notre langue
et connaissent l'art essentiel du mot
juste, et qui suffisent à mon bonheur.
Oui, mais Marmontel n'était pas auvergnat, il était limousin (bien qu'il usât ses culottes sur les bancs du collège de Mauriac, lequel est bien sis en Auvergne). Ses Mémoires sont excellents, quant au reste...
RépondreSupprimerExact.
RépondreSupprimerMarmontel écrit qu'il est né à Bort "en Limosin",mais quelques lignes plus loin : "Bort sur la Dordogne, entre Auvergne et Limosin"....
Et joyeux anniversaire ! N'est-il pas ?
RépondreSupprimerMerci Corto !
RépondreSupprimer"analphabètes ,"
RépondreSupprimerdu haut de votre savoir, si noble, vous serez sans doute ravi d'apprendre que l'on ne laisse pas d'espace avant la virgule, seulement après!
Emily
C'est un dilemme de l’Éducation Nationale. Vaut-il mieux faire monter d'un cran 90% d'une classe d'âge ou de neuf crans 10% d'entre eux?
RépondreSupprimerPompidou, petit-fils de paysans (mais fils d'instituteur), votait sans conteste pour la deuxième option.