Nos concitoyens, et même concitoyennes, se
sont détournés de leurs préoccupations habituelles (allumer leur
smartphone, tapoter, éteindre le smartphone, recharger le smartphone) pour consacrer
toutes leurs facultés d'attention sur un évènement qui allie la grandeur
tragique des loteries à l'intensité d'un supense haletant : l' élection municipale qui doit se dérouler en un certain village.
L'affaire est d'importance puisqu'une chaîne de télévision à la fois étatique et régionale a dépêché un envoyé
spécial afin d'interviewer certains candidats à l'édilité (car il y a
plusieurs listes en présence, et en concurrence, –trois, pour être exact --),
et des propos recueillis il fut fait une émission
d'une durée d'une dizaine de secondes, qui fut diffusée sur les ondes cantonales.
Un
concours de circonstances, un peu de curiosité et d'ambition sénile ont fait
que, en échange de promesses
que je tairai, je figure parmi ces
candidats.
La première conséquence de cette soif de
pouvoir a été ma désignation comme
assesseur pour siéger (du ? parmi?
dans? ) au bureau de vote lors du scrutin, ce qui m'a conduit à faire un petit
calcul.
Ce
bureau sera ouvert pendant dix heures
(six cents minutes) et, selon les derniers sondages, il se présentera
devant les urnes une centaine
d'électeurs ( et –trices), soit apparition d'un être humain toutes les six
minutes ou, si certains viennent voter en couple, d'abord foule de deux personnes,
puis onze minutes de désert. Il est possible d'imaginer d'autres combinaisons,
mais il semble certain que les moments de solitude ne seront pas en quantité
négligeable.
Je reconnais que ces considérations ( qui me
font craindre, les murs de la mairie étant dépourvus de ces fresques
historiques ou mythologiques excitant l'imagination et le sens critique, d'être
la proie d'un vague ennui) ne sont pas
d'intérêt national, seul l'est le résultat du scrutin, que les meilleurs
politologues annoncent très disputé.
J'allais m'apprêter cependant à dévoiler des
tendances, et peut-être émettre un pronostic, car j'ai recueilli des
informations quasi-privilégiées, lorsque j'appris qu'une loi interdit de telles révélations
à la veille du vote.
Je
m'y soumets et, chers lecteurs, chères lectrices, il vous faudra attendre
demain soir pour qu'apparaisse sur l'écran d'un appareil connecté le verdict que
tout un pays attend, entre crainte et espérance.
Je ne sais pas si c'est légal, mais je vous souhaite d'être élu (à moins, bien entendu que vous n'ayez le désir de ne point l'être) dès le premier tour : ça vous éviterait de longues heures d'ennui...
RépondreSupprimerVi, vi, vi, il y a des lois ! Et nos amis de gauche trouvent très bien qu'il y en ait, et même ils en voudraient d'avantage (et ils les obtiendront), parce que plus il y a de lois et plus la liberté est garantie.
RépondreSupprimerÇa va de soi.
Mais quelle commune saine de corps et d'esprit peut envisager d'élire un amoureux des lettres ? Quelle est cette commune exceptionnelle ?
RépondreSupprimerNous piaffons d'impatience!
RépondreSupprimerEntretenons le suspense...
RépondreSupprimerMais bientôt, premiers résultats, et commentaires.