Pour un
athée, est impossible toute discussion
(un dialogue de structure platonicienne, mais débarrassé des tyranniques
oripeaux de la maïeutique) d'ordre moral avec un croyant; celui-ci détient de
la révélation, parole divine, la vérité, cette vérité est une, absolue et tout
ce qui en découle, porté par des raisonnements irréfutables, est d'une
cohérence sans faille, impénétrable à toute objection logique, qui s'y
casserait les dents.
Et tout ce
que peut dire l'athée au croyant est : "Vous croyez que votre dieu vous a
parlé, pour moi, je ne crois pas à son existence, de ce moment nos routes
peuvent diverger ou converger, et nos actions s'opposer ou s'accorder, mais ce
qui les fonde n'est pas, ne peut être et ne sera jamais de même nature."
Si je
tiens pour erreur toute morale née de la croyance, je ne tiens pas pour vérité
une morale prétendument fondée sur la raison, telle qu'a voulu en établir
Emmanuel Kant dont les principes universalistes ne sont que mysticisme
égalitaire, et si je peux, de telles morales, en suivre les commandements, ce
serait parce que je les ai jugés pratiques, ou convenables au temps, mais non
par foi, ou conviction intellectuelle.
La morale
n'est que règle de conduite avec autrui, mais si je veux qu'elle soit plus que
coutume ou souci (prudent) de réciprocité, je lui donnerais volontiers pour
socle un sentiment, qui sera le
sentiment de la dignité de soi, qui n'est pas d'abord l'image que l'on veut
donner de soi à autrui, mais essentiellement l'image que l'on a , en tirant
profit de ses erreurs, construite de soi-même, et que l'on ne peut préserver
qu'en s'interdisant certains actes, et en se contraignant à en accomplir
d'autres.
Ce
sentiment de dignité (à qui la Rome antique doit sa fortune) a des enfants qui
se nomment (se nommaient) gloire et honneur; on ne les rencontre aujourd'hui
plus guère -- et quand a-t-on entendu un homme "public" invoquer sa
dignité pour justifier sa conduite?--, même si (de cela je ne veux pas douter)
ils demeurent dans les cœurs de quelques femmes et hommes.
La
Chrétienté (ainsi que d'autres sociétés) vécut d'une morale née de la foi, les
républiques et démocraties tentérent de prospérer sur une morale laïque (qui le
plus souvent devait aux commandements divins le meilleur d'elle-même), cela se
désagrégea en cette éthique de ceci
ou cela qui n'est que le fruit pourri des idéologies, ces révélations du jour, mais de ce que nous vivons dans une société
sans morale puisons la force réactionnaire de nous construire, chacun selon ses croyances ou convictions,
en être
moral.
Et digne.
Excellent billet qui me semble venir en réponse au commentaire Koltchak sur celui d'hier. Je le ressens comme tel mais peut-être me mets-je le doigt dans l’œil ?
RépondreSupprimerBien vu, Jacques!
SupprimerLe désagrègement de la morale en éthique est somme toute assez logique pour une société qui tend à valoriser et opposer le "moi" à la société. La morale a une portée universelle alors que l'éthique est une construction personnelle.
RépondreSupprimerIl me faudrait, cher M. Koltchak, plus qu'un pauvre billet pour exposer véritablement mes convictions, et nos aimables désaccords.
Supprimer"Mais de ce que nous vivons dans une société sans morale puisons la force réactionnaire de nous construire .."
RépondreSupprimerD'où le titre du blog ?
Peut-être un jour écrirai-je un billet à propos de Nietzsche....
SupprimerDieu est mort et avec lui sont morts ses blasphémateurs
SupprimerLa morale chrétienne a vécu.
C'est quoi d'ailleurs la morale ?
Les curés en tabliers ne nous invitent pas à leurs messes, et font peu de cas de la morale.
Quant aux dix commandements, à part un ou deux, faut reconnaître qu'ils sont bien difficiles à tenir de nos jours:
RépondreSupprimerTu adoreras Dieu seul et tu l'aimeras plus que tout.
Tu ne prononceras le nom de Dieu qu'avec respect.
Tu sanctifieras le jour du Seigneur.
Tu honoreras ton père et ta mère.
Tu ne tueras pas.
Tu ne feras pas d'impureté.
Tu ne voleras pas.
Tu ne mentiras pas.
Tu n'auras pas de désir impur volontaire.
Tu ne désireras pas injustement le bien des autres.
Très bon billet, bien vu, bien pensé, bien écrit.
RépondreSupprimerSeule la conclusion me laisse dubitative. Un "être moral" ? Vous sortez de chez vous de temps à autre ? Les avez-vous bien regardé, vos concitoyens ?
Bon, je cesse d'être méchante et vous laisse votre espoir. Pour moi, cet étiolement marque la fin d'une civilisation.
Notre civilisation a disparu depuis déjà un certain temps.
SupprimerPour prolonger votre article, on peut lire cet excellent billet sur notre socle chrétien.
RépondreSupprimer