Parfois le
regard se détourne des affaires du monde, par distraction, inadvertance, ou par
une nécessité pressante de satisfaire à un besoin naturel, et pendant que nos
yeux se sont posés ailleurs, que les
efforts de notre esprit furent mobilisés vers un agir égoïstement individuel et
non tendu vers la compassion, le partage et le vertueux souci d'un
accroissement du vivre-ensemble, avec
toujours plus d'ensemble et toujours moins de vivre, pendant ce funeste repli
sur soi, combien et tant d'évènements au retentissement cosmique se
déroulèrent!
Et alors
que le sens du devoir nous ramène à la contemplation de l'océan tumultueux des
nouvelles-qui-comptent se distinguent deux vagues roulant des abominations
annonciatrices de malheurs terrifiants, d'apocalypses inédites et de copie pour les journaux.
Tremblant
d'effroi et surmontant le haut-le-cœur accompagnant la découverte de
redoutables ignominies, le chroniqueur a appris que...
...fut
montrée sur tous les écrans devant lesquels se rassemble l'élite de l'humanité
l'image d'un homme, un soldat de la bienfaisante troupe chargée d'apprendre à
des peuplades exotiques les beautés du multiculturalisme et les principes de
tolérance établis par John Locke, un combattant du Bien qui exhibait sur la
manche de son uniforme de paix une sorte d'écusson où était inscrite une
devise, qui fut celle des armées du Mal.
Un seul homme,
une seule phrase, c'était assez pour que se mobilisassent les gardiens de la vertu,
de la démocratie et de l'amour, et parmi ces sonneurs de tocsin se firent
bruyamment entendre les membres d'un Parti jadis allié à ces mêmes armées du
Mal, et dont le chef toujours vénéré avait déserté pour, réfugié au sein du
Komintern, ne pas combattre les envahisseurs de sa terre natale.
Il fut un
temps, que le chroniqueur a vécu, où les troupes d'élite entonnaient des chants
de marche empruntés à l'ennemi d'hier, aux paroles parfois modifiées, parfois
conservées, ces chants leur étaient venus de vaincus enrôlés dans la Légion
étrangère, et les officiers qui, eux, avaient versé leur sang pour affronter la
Bête immonde, n'hésitaient pas à en reprendre les hymnes, parce qu'ils étaient
guerriers, exaltant des valeurs qui sont celles,
universellement, des hommes qui combattent.
L'imprudent
soldat devenu ce jour star-Fbook n'avait pas compris que certains mots, parce
qu'ils furent employés soixante-dix ans auparavant par les fidèles d'une
idéologie authentiquement criminelle mais totalement annihilée, sont désormais proscrits, et il n'est pas indifférent
que ces mots qu'il n'est plus permis de prononcer, ni même de penser, soient honneur et fidélité.
Mais il y
eut, en ce même temps que le chroniqueur fut négligent, un plus considérable
cataclysme : le Président fit une plaisanterie.
L'homme, on
le sait, est d'humeur badine, et lorsqu'il doit s'occuper de l'inversion du
sens d'une quelconque courbe ( chômage, dette, analphabétisme , production
industrielle, atteintes à la parité,revenu disponible de l'opulente Leonarda, et tout ce qui s'accroît ou s'effondre,
mais ne fait que monter quand cela devrait descendre et descendre quand il fut
annoncé que cela montait), hop! un coup d'œil dans les collections de Marius et du Hérisson, gazettes qui faisaient la joie des commis-voyageurs et
disparues avec eux, et un bon mot, une saillie y sont puisés, et répétés, avec
un sourire chargé d'une ironique supériorité, devant des auditoires que
l'admiration rend muets.
Hélas,
l'esprit présidentiel, ( et ici esprit
est employé dans le sens que M. le duc de Saint-Simon parlait d'esprit Mortemart et M. Proust d' esprit Guermantes) pourtant apte à
résoudre, par la seule force d'un verbe primesautier, toutes les difficultés
intérieures passées, présentes et à venir, a paru trop subtil pour être saisi,
en toutes ses fines nuances, par une population étrangère, bien que nous lui ayions, autrefois, fait cadeau de notre
langue.
Bref, cette
population, qui loge en partie outre-Méditerranée et en partie dans les
banlieues sensibles, se sentit vexée
par l'humour présidentiel ( et même d'autant plus outragée que la phrase fut
dite devant les adeptes d'une religion autre), et exprima son mécontentement en
des termes sévères , peu conciliants, et guère aménes pour le Président.
Sous cette
volée de bois vert, un homme soucieux de son honneur eût répondu en faisant
canonner les palais des insolents, mais nous avons vu que l' honneur a été aboli, par ailleurs, les
troupes disponibles ( et dans lesquelles,
comble de malheur, se pavane un élément
indésirable) s'affairent dans la partie noire
du continent que conquit l'homme blanc,
il ne restait plus au Président qu'à présenter des excuses, s'abîmer en regrets
et se rouler dans la repentance.
Il se
montra habile en cet exercice, mais les mots ne suffisent pas à guérir les
blessures qu'infligèrent d'autres mots, et c'est en chemise, pieds nus et la
corde au cou que le Président ira demain (cérémonie retransmise sur Arte et Youtube) implorer le pardon des Barbaresques, pendant que l'on
déversera sur sa tête des seaux emplis de pipi de chamelle.
Et tout
sera (enfin!) pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles.
Et la bêtise assistée de l'ignorance est à ce point triomphante qu'une chanson à boire (mais allemande!) est considérée comme un chant nazi. Il s'agit de "Ein Heller und ein Batzen".
RépondreSupprimerJe suis également un chaud partisan de l'arrosage de président au pipi de chamelle.
RépondreSupprimerComment osez-vous salir la mémoire du "Fils du Peuple" ? Il n'est parti à Moscou que pour mieux en revenir. La preuve : le grand De Gaulle en fit un ministre !
RépondreSupprimerParfois le regard se détourne des affaires du monde, par distraction, inadvertance, ou par une nécessité pressante de satisfaire à un besoin naturel, et pendant que nos yeux se sont posés ailleurs, que les efforts de notre esprit furent mobilisés vers un agir égoïstement individuel et non tendu vers la compassion, le partage et le vertueux souci d'un accroissement du vivre-ensemble, avec toujours plus d'ensemble et toujours moins de vivre, pendant ce funeste repli sur soi, combien et tant d'évènements au retentissement cosmique se déroulèrent!
RépondreSupprimerPhrase trop longue.
Il faudra, à l'avenir, songer à épurer.
J'aime les phrases longues, prend plaisir à les écrire et celle que vous citez est, en son ample déroulement, très belle.
RépondreSupprimerA l'avenir, riant de vos commandements, je m'efforcerai de faire encore plus serpentin..
Je trouve très louables les efforts de notre bon président pour faire rire son peuple en ces temps de morosité.
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