The hollow crown regroupe trois adaptations
cinématographiques, produites pour la BBC, de drames historiques de William
Shakespeare; j'en fis l'acquisition il y a quelques mois, pour l'enfouir sous
une pile de dvd et blu-ray à voir un jour, lointain.
Pour des raisons que je cèlerai, j'en
extirpais hier Henry V, que madame
mon épouse et moi regardâmes.
Nous y prîmes du plaisir, les coupes,
nécessaires pour ramener l'œuvre à une durée, déjà coquette, de 133 minutes, ne
nuisent pas au récit, les acteurs sont très bons –et Mme Mélanie Thierry, dans
le rôle de Catherine de France s'efforçant de retenir quelques mots d'anglais
est absolument adorable-- , les décors crédibles, et la bataille d'Azincourt ( Agincourt in english), dans laquelle
périt la fleur de notre noblesse (y furent tués huit mille quatre cents
gentilshommes dont six princes du sang...) est agréablement sanglante.
J'eus pourtant un mouvement de surprise (i-e
: je donnais un coup de pied à madame mon épouse qui s'assoupissait) en observant
que l'acteur jouant le rôle du duc d'York – a
cousin to the king -- était un monsieur à la peau
indiscutablement noire.
Certes, cet acteur est de mine avenante et,
même s'il semblait un peu surpris d' être devenu, en 1415, un parent
du Roi d'Angleterre, son jeu ne mérite que des éloges.
Sa présence, pourtant, entraîne quelques
interrogations.
Quelques producteurs de ce Henry V sont des gens d'Hollywood qui
doivent sincérement croire qu'il se trouvait des Africains dans la parentèle
des Plantagenêt, mais je soupçonne qu'il y a, dans ce choix de distribution,
une habile volonté de promotion du vivre
ensemble.
Il semble en effet intégrant de montrer aux jeunes britanniques d'origine exotique et
de l'an 2015 que, six siècles plus tôt, leurs ancêtres occupaient de hautes
charges en une Cour ignorant tout racisme, et je pense qu'il serait bon que les
producteurs français (et subventionnés) imitassent l'effort pionnier de la BBC.
Cherchons donc dans notre répertoire
dramatique, hélas assez pauvre en drames
historiques et nationaux, mais nous pourrions y puiser cependant Le Siège de Calais (1765) de M. de
Belloy, en choisissant pour interpréter les fameux bourgeois des hommes venus des plus lointaines contrées, dont le teint d'ébène formerait un plaisant contraste avec la blanche corde entourant leur cou.
Ou un
talentueux scénariste pourrait, en ne forçant qu'à peine la réalité historique,
montrer de rudes combats navals dans lesquels, au temps de l'alliance de
François Ier avec le Grand Turc, des soldats français lutteraient côte-à-côte
avec des janissaires mahométans contre les catholiques matelots et galériens de
Charles Quint.
Mais je préférerais que fût, selon nos nouveaux principes, adapté pour les
grand et petit écrans, Les Druides
(1772) de M. Le Blanc de Guillet, tragédie en tout point conforme à l'esprit des Lumières; on y pourrait ainsi
voir qu'aux temps les plus reculés le peuple de la Gaule était déjà heureusement arc-en-ciel, et ce serait alors en toute
légitimité que, dans nos belles salles de classe de pimpantes banlieues, de joyeux et multicolores
bambins ânonneraient de nouveau et fièrement nos ancêtres les Gaulois.