david in winter

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Editeur. Ecrivain. Dilettante

samedi 10 mai 2014

Le bonheur dans l'esclavage



    Un beau jour, une petite bande de députés désoeuvrés, et appartenant pour l'essentiel à une majorité de droite, vota une loi de repentance élevant au statut privilégié, et nettement rétroactif,  de crime contre l'humanité une ancienne activité très humaine nommée esclavage; afin de ne pas chagriner certaines catégories de population actuellement vivantes ( et riches en pétrole), les vaillants législateurs précisérent que c'est exclusivement  l'esclavage pratiqué par des hommes à peau blanche, chrétiens , morts depuis bien  longtemps et oeuvrant en Afrique qui est anathémisé par la nouvelle loi, qui institua également une sorte d'obligation de vilipender annuellement, chaque 10 mai, les Européens coupables et les vouer aux gémonies.
   Nous sommes le 10 mai, et nous sentons qu'il est de notre devoir de nous joindre au chœur des imprécateurs officiels pour montrer la source de cet esclavage honni, en recourant aux textes.
   En 1734, un individu de sexe masculin, anglais, protestant et à peau blanche, le capitaine William Snelgrave écrivit un ouvrage intitulé New Account of Some Parts of Guinea, qui fut aussitôt traduit en français par A. Fr. D. de Coulange et publié en 1735 sous le titre : Nouvelle relation de quelques endroits de Guinée et du commerce d'esclaves qu'on y fait (réédité à Paris, 2008, avec un titre inventé, absurde et mensonger).
   De sa profession, le capitaine Snelgrave se rendait en Afrique afin d'acheter à des marchands à peau noire des hommes et des femmes (également à peau noire) pour les transporter sur son navire aux Indes occidentales, et les y revendre, avec profit.
  Son livre raconte ce qu'il a fait et vu, (ainsi, les sacrifices humains auxquels il assista) : c'est donc un témoignage de première main.
   A le lire, nous observons d'abord que, de même que ses confréres chétiens exerçant le même métier, William Snelgrave n'envahissait pas le sol africain à la tête de troupes fortement armées pour razzier dans les villages des douzaines de malheureux et malheureuses ( ce que faisaient ses confréres mahométans), plus simplement, et avec pour toute escorte deux ou trois compagnons, il allait, muni de monnaie d'échange, acquérir auprès de marchands à peau noire sa cargaison humaine.
  Pourquoi ces marchands disposaient-ils d'un stock humain à vendre?
  William Snelgrave expose " la manière dont ces gens-là deviennent esclaves", citons-le.
  "I. Cela a été une coutume établie parmi les Nègres, de temps immémorial, et qui subsiste encore chez eux aujourd'hui, de rendre esclaves tous les captifs qu'ils font à la guerre. Or, avant qu'ils eussent occasion de les vendre aux Blancs, ils se trouvaient souvent dans la situation d'en tuer un grand nombre, quand ils en avaient pris plus qu'ils n'en pouvaient employer dans leurs propres colonies.
  "II. La plupart des crimes qui se commettent parmi eux y sont punis par des amendes; et s'il se trouve que le coupable n'ait pas moyen de payer ce à quoi il est condamné, il devient esclave et est vendu comme tel.
    "III. Les débiteurs qui refusent de payer leurs dettes, ou qui ne sont pas en état de le faire, sont aussi dans le cas d'être faits esclaves (...) mais leurs compatriotes les gardent la plupart, pour s'en servir eux-mêmes.
    "IV. J'ai ouï dire qu'il est fort ordinaire à quelques peuples de l'intérieur du pays de vendre leurs propres enfants comme esclaves , sans y être même portés par la nécessité, ce que je n'ai pas de peine à croire. Mais je n'ai jamais rien vu faire de pareil à ceux qui habitent le long de la mer, à moins qu'ils n'y fussent forcés par un extrême besoin et par la famine."
    William Snelgrave consacre ensuite plusieurs pages à expliquer "que ce commerce n'a rien qui puisse le faire condamner".
   Quels sont les arguments de Snelgrave?
   La peur du gendarme me retient de les recopier.

*Le titre de ce billet est emprunté à Jean Paulhan, préface à Histoire d'O, de Pauline Réage [Dominique Aury].

10 commentaires:

  1. Ah ! Puissent-ils vous lire, ceux qui iront fouler ou fleurir le mémorial d'ici, que le Maire de l'époque, devenu Premier Ministre avant de se faire virer (ouste !) a fait bâtir.

    (Il est vrai que du pont Schoelcher à l'Arbre des Droits de l'Homme, la voie est large et il y avait de la place pour une esplanade).

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  2. J'ai raconté dans un ancien billet que notre boy-cuisinier à Thiès (Sénégal) était l'heureux propriétaire de deux "captifs" (comprendre esclaves) dont l'un travaillait chez Renault à Douai (Département du Nord) et lui envoyait le plus gros de son salaire de crainte qu'il n'aille voir un marabout qui, à l'aide d'une poupée à son effigie, lui ôterait la vie. De même, ce brave Mamadou (le boy) nous avait conté qu'il refuserait de donner sa fille en mariage à certains ministres car ils étaient des esclaves. Les Français, comme le firent jadis les romains, ayant pris l'habitude d'offrir aux fils de chefs une bonne éducation dans leurs pensionnats (et ce faisant de disposer d'otages en cas de trouble), les rusés chefs leur remettaient non pas leurs enfants mais des enfants d'esclaves. Ainsi, la hiérarchie traditionnelle se trouva-t-elle inversée, les gens instruits qui prirent le pouvoir à l'indépendance appartenant souvent aux classes "maudites". Mais tout cela se passait il y a une bonne quarantaine d'années. Gageons que tout a changé...

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    1. Merci pour ces précieuses informations, que nous ne lirons pas dans la presse subventionnée.

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  3. M. Snelgrave, ignorant probablement les lois du marché, ne pouvait guère se douter qu'en créant une demande, il incitait les marchands à la peau noire à la satisfaire. Il pouvait donc se persuader qu'il n'avait aucune responsabilité dans le sort des malheureux qu'il achetait.

    L'homme moderne ne peut finalement que constater que M. Snelgrave ne se distinguait de ceux qu'il nommait des sauvages que par son habit, et œuvrer pour que ce genre d'individus n'aient plus l'occasion de perpétrer leurs sinistres forfaits.

    Ferrante

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  4. Sur la côte ouest de l’Afrique, au Bénin, des familles vendent leurs enfants à des intermédiaires qui vont les livrer nombreux, dans des conditions de transport souvent dangereuses, au Gabon, où ils seront esclaves dans des plantations ou bien domestiques quand ils ne finissent pas sur un trottoir de Brazzaville pour les plus tentantes des petites filles.
    Ou pourra dans ce dernier cas incriminer les clients Blancs, mais ce serait faire l’impasse sur la réalité : 99% des clients des prostituées sont Noirs.
    Le Congo n’est pas le seul pays de destination de ces enfants esclaves, que l’on estime aujourd’hui au nombre de 50000 rien que pour le pourvoyeur de ses voisins en chair fraîche, le Bénin: le Mali et le Nigeria font partie des destinations principales de ce bétail humain du vingt-et-unième siècle.

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  5. Mouiller le peuple français dans la traite atlantique est une fabrication, le culpabiliser une supercherie.
    Mon avis non autorisé :
    Jim Crow, wazza ?

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  6. Les africains ont du mal à reconnaître leur participation aux différentes traites négrières même si certains osent aborder la traite arabo-musulmane en le qualifiant de génocide voilée.

    A ceux qui évoquent l'état de décrépitude de l'Afrique par la ponction de millions de noirs pour la traite atlantique, on peut leurs répondre que la peste noire a pratiquement anéantie l'Europe dans certaines régions, on pouvait traverses des villages fantômes et pourtant l'Europe s'est relevée mais cela est une autre histoire.

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  7. Quand on pense que Taubira a dit en novembre dernier dans l'Express: "Il ne faut pas trop évoquer la traite négrière arabo-musulmane pour que les jeunes arabes ne portent pas sur leur dos tout le poids de l'héritage des méfaits des arabes."
    Ben voyons! En revanche cela ne la gêne pas du tout s'il s'agit de Blancs.

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