david in winter

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Editeur. Ecrivain. Dilettante

mardi 1 mars 2016

Modeste proposition pour la paix religieuse

  

    On sait que, le 19 février 1715, le roi Louis XIV, d'heureuse mémoire, accorda en son palais de Versailles une audience solennelle à Mehemet Riza Beg, ambassadeur extraordinaire du roi de Perse, et que les mauvaises langues, dont M. le duc de Saint-Simon, dénigreur obsessionnel du grand Roi,  suivi de  M. de Montesquieu dans ses spirituelles et fielleuses Lettres persanes, affirmèrent que cet ambassadeur n'était qu'un imposteur dont le souverain français fut la naïve dupe, et que le traité de commerce alors signé entre les royaumes de France et de Perse n'eut aucun effet.
    Ce sont là de misérables, et de la part de ces deux auteurs, habituelles, calomnies.
    Dans un excellent ouvrage, Une ambassade persane sous Louis XIV (Paris,1907) que je viens d'acquérir et lire, M. Maurice Herbette établit, en utilisant les archives des Affaires étrangères,  la réalité de la qualité d'ambassadeur de Mehemet Riza Beg (et des effets bénéfiques du traité de commerce) et publie en appendice à son récit diverses pièces justificatives.
    Parmi celles-ci figure, traduite par l'interprète de l'ambassadeur de France à Istanboul, M. Padéry, la Lettre du Roi de Perse Hussein à Louis XIV, qui débute par de délicieux compliments odorants et parfumés, et dont j'extrais ces lignes:
     "Le grand empereur [Louis XIV] dont l'esprit est si éclairé n'ignore pas, sans doute, que les Arméniens (...) sont obligés de payer à notre trésor un tribut afin de pouvoir conserver leur religion en paix sans être inquiétés" ( je rappelle que les Perses étaient mahométans et les Arméniens chrétiens).
    Ce texte me fit réflèchir.
    J'ai en effet appris par les gazettes que, d'une part, les caisses de M. Etat sont aujourd'hui fâcheusement vides, et que, d'autre part, des turbulences nées de divergence de religions troublent la paix de notre vieille patrie gauloise.
    Il ne me fallut guère de temps pour que s'imposât à mon esprit une solution élégante pour remédier, grâce à un simple édit, à ces deux soucis.
    Il suffit d'établir une religion d'Etat (au hasard, la religion catholique, apostolique et romaine) puis de faire payer un tribut (mettons, de dix à trente pour cent de leurs revenus) à tous les fidèles d'autres religions ( mormons, mahométans, scientologues, shintoïstes, etc.) pour qu'ils puissent pratiquer librement leur culte et, si les rentrées s'avéraient insuffisantes pour les besoins de M. Etat,  la mesure pourrait être étendue aux divers hérétiques (nestoriens, anabaptistes, calvinistes, sociniens, ariens etc.).
    Et voici le Trésor s'emplir et  la tolérance règner, tandis que d'irritantes dissenssions cédent la place à une fraternelle harmonie.
    Ne suis-je pas un digne héritier des bienfaisants philosophes des Lumières?

    PS.- L'ambassadeur  Mehemet Riza Bey était un individu aussi arrogant que malpoli, et le récit de son voyage en France, suite d'étonnants incidents, est fort divertissant.

3 commentaires:

  1. Heureux de vous savoir de retour !
    Excellente proposition. Elle est déjà mise en partie en pratique, non par l’État (la bénédiction soit sur lui) mais par ceux qui pour égorger rituellement font payer des taxes, ce qui doit doubler leur plaisir. La religion comme source de revenus, c'est effectivement une bonne idée et des ressources sans fin.
    Quant à l'ambassadeur Mehemet Riza Bey qui "était un individu aussi arrogant que malpoli" il ne faisait qu'ouvrir la voie des mahométans qui nous arrivent.

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    1. Les Perses mahométans étaient, sauf cet ambassadeur,qui avait d'ailleurs des excuses..., des hommes d'une infinie politesse.
      Quant aux allogènes "qui nous arrivent", s'ils sont "arrogants et malpolis", ce n'est pas parce qu'ils sont mahométans, mais parce que ce sont des pauvres, espèce généralement peu estimable.

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    2. Pourquoi les guillemets ?

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